Depuis 2014, à chaque 1er janvier, c’est parti pour le “Dry January”. Vous ne ressentez pas de dépendance à l’alcool mais en revanche vous consommez du tabac ? Pourquoi ne pas profiter de ce mois d’abstinence, quel qu’il soit, pour arrêter de fumer. Emilie Delétré, Hypnothérapeute reçoit dans son cabinet de nombreux patients désireux de stopper le tabac et obtient un taux de réussite de plus de 90%. Elle nous en dit plus sur sa méthode.
KALAE : Comment êtes-vous devenue hypnothérapeute ?
Emilie Delétré : Ancienne DRH, j’ai quitté le secteur de l’entreprise il y a 7 ans. C'étaient les débuts du coaching, j’en avais d’ailleurs bénéficié dans mon cadre professionnel. Je me suis formée en PNL (programmation neuro linguistique) et ai rencontré à cette occasion Anné Linden, ancienne élève de Milton Erickson. Diplômée de Columbia University College, Anné LINDEN a fondé le New York Training Institute of hypnosis en 1979. Elle s'appuie sur plus de 40 années d'expérience en tant que formatrice, conférencière et clinicienne.
Je me destinais plutôt vers le coaching d’entreprise mais ma formation et cette rencontre avec Anné se sont révélées déterminantes pour la suite de ma reconversion professionnelle. L’hypnose m’a ouvert un champ extraordinaire. Je suis donc devenue hypnothérapeute puis me suis formée en EMDR ainsi qu’à d’autres approches très complémentaires de l’hypnose. Le fonctionnement du cerveau et tout ce qui a trait aux neurosciences a complètement transformé ma façon de vivre et de travailler. Je dispense également des coachings et des formations en entreprise. Je mixe les techniques en fonction des besoins des uns et des autres.
Il y a des grands sujets en hypnose, notamment l’arrêt du tabac, l’amincissement, les traumatismes, les addictions. Le principe de la neuropathie consiste à transformer les automatismes du cerveau. Concrètement on peut agir sur tous les sujets tant que la personne est motivée évidemment. il ne s’agit pas d’une technique magique, Il existe un temps de traitement de l’information du cerveau nécessitant plusieurs séances par ailleurs le lien thérapeutique a son importance.
KALAE : Comment s’arrêter de fumer avec la Neurothérapie ?
E.D. : J’utilise les techniques de l’hypnothérapie, l’EMDR et le coaching en cabinet afin de permettre à mes patients d’arrêter de fumer définitivement et sereinement, en 3 séances.
En effet, nos émotions, nos comportements, nos croyances, nos pensées… sont construites par notre cerveau alors pourquoi ne pas aller directement à la source pour restructurer, dans la tête, les comportements au service du bien-être et de la liberté ?
Tout ce que nous faisons, nous pensons, nous ressentons est généré par notre cerveau. Il a créé des associations qu’il a automatisé, à un moment où c’était utile pour lui. On va donc, dans le travail thérapeutique déconstruire ces automatismes et les liens entre les déclencheurs et les comportements. Par exemple : un café = cigarette.
En construisant de nouvelles associations des choses, on bâtit peu à peu une nouvelle représentation du monde, sans cigarette.
Lorsque l’on a l’objectif d’arrêter de fumer, c’est qu’une partie de nous a déjà dealé avec cette partie inconsciente qui cherche à développer notre bien-être et notre bonne santé. En quelque sorte cette partie vient réinterroger le mécanisme qui s’est fixé et le travail du thérapeute et de faire émerger toutes les autres parties : la motivation, le changement, l’émergence des valeurs liées à cette nouvelle version de soi sans cigarette. L’inconscient du patient programme donc de nouvelles pensées, de nouvelles croyances, de nouveaux comportements et les automatise. Si bien que certains patients ne se souviennent pas avoir été fumeurs un jour !
KALAE : Est-ce que l’inconscient pilote nos croyances ?
E.D. : Oui tout à fait. La partie de notre cerveau qui génère nos projets, nos envies, et qui porte toutes nos ressources s’appelle l’inconscient, voilà pourquoi nous utilisons l’hypnothérapie qui contourne le conscient et permet de solliciter la partie imaginaire du patient.
Notre monde intérieur et notre façon de fonctionner sont régis par des croyances, toutes vraies et importantes pour nous. Par exemple « je crois que je ne passerai pas une bonne soirée si je ne fume pas ». Le thérapeute va questionner cette croyance et permettre au patient de visualiser une soirée dans laquelle c’est parfaitement ok de ne pas fumer tout en passant une belle soirée.
Ce travail de déconstruction des ancrages et des déclencheurs est essentiel pour libérer le patient de toutes les associations qui ne sont plus utiles au fonctionnement de la personne.
Notre partie inconsciente est capable d’imaginer d’autres perceptions, d’autres façons de penser, et ainsi d’envisager de nouvelles façons de faire.
Par exemple, si dans notre cerveau il existe un lien entre le stress et la cigarette, l’inconscient peut imaginer de nouveaux comportements, plus bénéfique pour le patient. Naturellement, le thérapeute construit avec lui, au fil des échanges des différentes séances, les associations, les métaphores qui seront utiles à l’objectif du patient.
KALAE : Que se passe-t-il dans une séance d’hypnose ?
E.D. : Le patient est allongé et le thérapeute se positionne à côté de lui. Sa voix et la musique qu’il utilise diffusent des ondes hertziennes nommées Alpha, proches des ondes du sommeil. Cette fréquence détend naturellement le corps et le cerveau relâche les structures neuronales habituelles pour en créer d’autres. En clair, la voix du thérapeute accompagne la construction de nouvelles associations par l’expérience que l’imaginaire traverse à ce moment-là. C’est un peu comme si une nouvelle arborescence se développait et qu’un souvenir se positionnait. Le cerveau apprend donc à relier émotions, pensées et comportements sur un nouveau schéma, comme une nouvelle version de soi, plus indépendante, plus libre…
À la fin de la séance qui dure environ une heure trente, vous ressortez détendu, serein, comme si quelque chose avait lâché en vous. Entre deux séances, je conseille des séances sur ma chaîne Youtube à écouter. Ces audios de soutien approfondissent le travail fait en séance et permettent de réduire le nombre de séances en cabinet ou en visio. Par ailleurs, c’est tout un nouvel équilibre qui se met en place : lorsque l’on fait de l’hypnose, on dort mieux, on a davantage conscience de ce qu’il se passe en nous et donc nous agissons davantage en « conscience » de notre environnement. « C’est un peu comme si tout notre monde restait le même mais changeait un petit peu, en mieux ! ».
KALAE : Quelle est votre approche de l’hypnose et de l’EMDR pour le traitement des addictions
E.D. : L’accompagnement à l’arrêt du tabac peut se faire simplement grâce à l’hypnothérapie, généralement en trois séances en cabinet ou en téléconsultation. Il arrive que certains patients aient aussi besoin d’EMDR pour approfondir le travail de restructuration. L’EMDR est une technique de retraitement de l’information par le cerveau, en faisant bouger les yeux, organes le plus proche de la zone de traitement et de stockage des informations. L’EMDR est utile lors des résistances de certains patients mais aussi pour travailler sur toutes des situations qui génèrent du stress, de la peur, de l’anxiété… et qui conduisent à la consommation de cigarette.
KALAE : Vous utilisez donc aussi l’hypnothérapie associée à l’EMDR ?
E.D. : J’ai mis en place une technique particulièrement efficace pour le traitement des addictions en associant les protocoles d’arrêt du tabac de l’hypnothérapie avec ceux de l’EMDR. Avec cette technique, le taux de réussite de l’arrêt du tabac atteint 90 % des patients, enfin ! Pourquoi ? Parce que l’hypnothérapie n’est pas toujours suffisante pour lever définitivement les associations très profondes, utilisées depuis plusieurs dizaines d’années dans le cerveau. Lorsque l’on est fumeur, on tient beaucoup à la cigarette, le lien que chaque fumeur entretient avec le geste, avec la nicotine, avec l’odeur, avec toutes les représentations sociales reste singulièrement profond. Un fumeur peut avoir peur d’arrêter de fumer, même si sa santé est dégradée et qu’il doit absolument s’arrêter au plus vite. L’EMDR, dans ce cas, peut améliorer la rupture des associations, plus rapidement et lever toutes les peurs liées à l’arrêt du tabac. Les représentations des fumeurs sur les risques d’arrêt et toutes les situations auxquelles ils seraient exposés sont particulièrement catastrophiques : réveils nocturnes, crises de panique, prise de poids, irritabilité, pétage de plomb… toutes ces croyances se déconstruisent grâce à l’EMDR. On travaille beaucoup sur le stress et la peur avec l’EMDR. C’est normal d’avoir peur de changer mais ce n’est pas la peur qui doit dominer notre vie, nous en sommes tous d’accord.
« La technique inclut dans les mêmes séances restructuration et associations nouvelles », ainsi, le patient a accès à toute l’expérience sensorielle passée et future qui influence peu à peu sa croyance en ce nouveau lui, non fumeur. »
KALAE : Quels sont les bénéfices de ces deux techniques combinées ?
E.D. : S’arrêter avec l’hypnothérapie et l’EMDR est un gage de bien-être. De cette façon, aucune émotion et sensation négative n’apparaît. Dans le corps comme dans la tête, l’arrêt est complet. La plupart des fumeurs en sortant de la séance ne sentent libérer totalement, c’est agréable d’avoir réellement le sentiment de piloter sa vie ! Naturellement les effets sur le corps se ressentent de façon quasi immédiate : meilleure respiration, meilleure capacité cardiaque, plus belle peau, meilleur odorat, les cheveux et les mains qui sentent bons… Le regard sur soi change également. Vous réussissez un objectif de vie, cela donne de la confiance et développe l’envie d’aller plus loin, d’avoir d’autres projets liés à sa santé ou d’autres !
En effet, l’EMDR va approfondir. En faisant ainsi, nous traitons toute la chaîne d’association entre la cigarette et les liens que le patient a structuré. De cette façon, toutes les situations de vie qui généreraient un échec de l’arrêt sont reprogrammées dans le cerveau et induisent un autre comportement, plus bénéfique pour le patient.
KALAE : Qu’en est-il de l’arrêt du tabac et de la prise de poids ?
E.D. : Qui a dit au cerveau “pas de tabac implique de manger plus” ? Personne !
Ce n’est pas l’association qu’un cerveau fait spontanément. Je sais que beaucoup de personnes freinent leur projet d’arrêt de la cigarette car elles ont peur de grossir mais un bon thérapeute saura lever cette stupide croyance ! Les anciens fumeurs sont-ils tous obèses ? Non ! Un travail efficace sur l’arrêt du tabac vous permet d’appréhender tous ces sujets, l’objectif d’un accompagnement thérapeutique est de vous faire accéder à votre liberté, pas de créer une nouvelle dépendance !
KALAE : Et l’alcool dans tout ça ?
E.D. : Tabac et alcool vont souvent de pair dans la tête des patients. Qu’il s’agisse d’alcool mondain ou d’une consommation plus fréquente, le tabac est dissocié de la prise d’alcool, comme il l’est du café. Encore une fois, est-ce que toutes les personnes qui boivent de l’alcool fument ? Non. Vous pouvez ainsi vous sentir libre de vous libérer de cette addiction tout en conservant le plaisir de boire un verre. Mais si vous voulez vous challenger un peu, c’est la bonne période pour entamer un dry january !
KALAE : Quels conseils donneriez-vous pour se reprogrammer que ce soit pour le tabac, l'alcool, la gestion du poids ?
E.D. : Quel que soit le résultat recherché : arrêt tabac, dry january d’alcool, perte de poids, il est essentiel de se fixer un objectif. S’accorder du temps pour le déterminer puis détailler des étapes intermédiaires pour atteindre cet objectif. On peut l’envisager seul mais c’est vrai qu’un accompagnement peut vraiment aider.